Gestion des doses au public durant une urgence nucléaire
Mai 2015
Le désastre survenu à la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi a soulevé de nombreuses questions sur la planification et la prise de décisions en cas d'urgence, plus particulièrement lorsqu'il s'agit de la protection des personnes contre le rayonnement. Les Japonais connaissaient la dose limite annuelle de 1 millisievert (mSv) pour le public et comprenaient que cette limite les protégeait. Par contre, la confusion s'est installée quand on leur a dit, après l'accident, qu'ils pouvaient rentrer chez eux même si la dose de rayonnement pouvait atteindre 20 mSv par année. Pourquoi un tel changement? Cette fiche d'information porte sur le concept de limites de dose : ce qu'elles sont, ce qu'elles ne sont pas et leur importance lors de situations d'urgence.
Fiche de renseignements - Gestion des doses au public durant une urgence nucléaire (PDF)
Quelques faits
- L'impact de l'exposition au rayonnement sur la santé est très bien compris.
- Peu de faits scientifiques soutiennent l'existence d'effets nocifs mesurables sur la santé lorsque les doses de rayonnement sont en deçà de 100 millisieverts.
- Les limites de dose de rayonnement sont établies pour limiter l'exposition au rayonnement à des niveaux bien en deçà des niveaux nocifs afin de protéger la santé et la sécurité du public.
- Lors d'une urgence nucléaire, des lignes directrices sur l'intervention sont appliquées. Ces étapes et mesures sont fondées sur la prévision que les mesures prises feront plus de bien que de mal.
Qu'est-ce qu'une dose de rayonnement?
Lorsque le rayonnement ionisant pénètre le corps humain, il y dépose de l'énergie. L'énergie absorbée est appelée « dose ». Elle risque d'endommager certaines cellules du corps qui par la suite peuvent devenir cancéreuses. Le principal effet nocif de l'exposition au rayonnement sur la santé est le cancer.
Pourquoi établir des limites de dose?
Les limites de dose de rayonnement sont établies pour protéger la santé et la sécurité du public et des travailleurs en limitant leur exposition à des niveaux bien en deçà des niveaux nocifs.
La Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) suit les recommandations de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR), formulées notamment par des scientifiques et d'autres professionnels de renommée mondiale dans le domaine de la radioprotection. La CIPR utilise les connaissances scientifiques disponibles ainsi que l'évaluation des facteurs sociaux prévalents pour établir des limites de doses acceptables.
Au Canada, la limite de dose annuelle pour les personnes qui ne sont pas des travailleurs du secteur nucléaire (appelés « membres du public » dans le présent document) est de 1 mSv conformément au Règlement sur la radioprotection. Cette limite est établie pour des expositions individuelles qui pourraient se produire lors d'activités autorisées effectuées conformément au permis délivré par la CCSN.
Cependant, les limites de dose ont été faussement interprétées comme la ligne qui sépare ce qui est sécuritaire de ce qui ne l'est pas. La limite de dose de 1 mSv par année est une limite réglementaire et non une limite de sécurité par rapport à la santé. Elle a été établie en fonction des preuves scientifiques concernant les effets du rayonnement sur la santé ainsi que des jugements de valeur et de la société à l'égard des risques de l'exposition et des avantages de l'activité autorisée.
En plus de prendre des mesures pour empêcher que les limites de dose ne soient pas atteintes, les titulaires de permis doivent aussi mettre en place des pratiques qui ont pour but de maintenir les doses à un niveau aussi faible que possible.
Que se passe-t-il lors d'une urgence?
Lors d'une urgence nucléaire, des mesures autres que les limites de dose sont appliquées; ce sont les lignes directrices sur l'intervention aussi appelées « mesures de protection ». Ces lignes directrices définissent les étapes à suivre et les mesures à prendre en cas d'urgence nucléaire pour protéger le public; elles sont fondées sur les références internationales qui ont été établies selon le concept de « faire plus de bien que de mal ». Elles comprennent des restrictions visant la consommation d'eau et de nourriture, des recommandations sur la prise de comprimés d'iodure de potassium, la mise à l'abri sur place et, dans certains cas, l'ordre d'évacuer, voire de déménager dans les cas extrêmes. Il faut noter que ces lignes directrices existent à titre de recommandations, c'est pourquoi elles doivent demeurer souples. Elles sont axées sur le concept de dose « évitée » (dose évitée par l'application de mesures) ou de dose « projetée » (dose qui serait reçue si aucune mesure n'est prise).
Les personnes qui prennent des décisions liées à la planification et à l'intervention en cas d'urgence savent que, dans des situations d'urgence, le coût social et économique pour éviter l'exposition à une dose de rayonnement peut être extrêmement élevé. Par exemple, l'évacuation de personnes lors d'une urgence pourrait causer plus de tort que l'exposition à une dose de rayonnement supérieure à la normale. Éviter l'exposition au rayonnement pourrait causer d'importantes perturbations, comme la réinstallation permanente après une évacuation, ce qui entraînerait la perte de maisons, de fermes, de nourriture et de revenus. Certaines collectivités du Japon sont encore touchées par le stress de l'évacuation de Fukushima. Les leçons retenues de l'accident de Tchernobyl ont clairement indiqué que les personnes touchées pourraient avoir besoin d'aide et de soutien à long terme en raison du stress causé par l'accident et ses conséquences
Les mesures d'urgence sont axées sur des connaissances scientifiques ainsi que sur l'évaluation des facteurs sociaux. Les lignes directrices sur l'intervention sont élaborées en soupesant les avantages et les risques associés aux différentes mesures. Le tableau suivant décrit les avantages et les risques de procéder à une évacuation.
Avantages d'une évacuation | Risques liés à une évacuation |
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Même si les doses reçues par le public au cours d'une urgence peuvent être supérieures à celles reçues par le public dans des conditions normales, elles sont contrôlées par la mise en place de mesures de protection qui les empêchent d'atteindre des niveaux dangereux. Dans des conditions normales ou lors d'urgences, la CCSN et d'autres organismes fédéraux et provinciaux veillent à la sûreté du public en limitant son exposition au rayonnement ionisant. Ils choisiront la solution qui causera le moins de tort à la population touchée en prenant en compte les informations scientifiques disponibles ainsi que les facteurs sociaux qui prévalent.
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